THE QUEEN OF THE DAMNED : DOSSIER
"Mon agent m'a appelée et m'a demandé si ça m'intéresserait de jouer le rôle d'une journaliste française dans un film de vampires.
Le tournage doit avoir lieu à Melbourne (un endroit qui m'est familier) et je n'aurai à assurer qu'un jour de tournage.
Ce n'était donc pas un mauvais plan hollywoodien.
Ca me permettrait de retrouver de vieux amis et puis, voir à nouveau le soleil se coucher sur St.Kilda n'était pas pour me déplaire.
Je suis prête à dire mes deux lignes à l'envers, tout en faisant le poirier.
Le réalisateur s'arrête dans la salle d'attente pour discuter avec quelqu'un que j'ai déjà vu à la télé.
Il me fait un clin d'oeil puis continue à bavarder avec lui. On me fait entrer dans une pièce.
J'ai une longue discussion avec le réalisateur et, ensuite, je joue ma scène (je dis mes deux lignes).
Le réalisateur: "Votre accent français est impeccable Claudia, mais pourquoi auditionnez-vous pour ce rôle ?"
Moi: "Pardon ?"
Le réalisateur: "Quand je vous ai vue dans la salle d'attente, je me suis dit que vous devriez jouer une vampire !"
Moi: "Eh bien, merci, je crois."
Le réalisateur: "Pandore! Si je vous donne quelques pages, est-ce que ça vous dérangerait de les lire et de revenir les jouer devant moi?"
C'est alors que la directrice de casting intervient: "Claudia ne pourra pas jouer ce rôle car elle tournera dans 'Farscape".
Je réplique alors, d'un air aussi dégagé que possible: "C'est vrai mais, d'après mon contrat, ça pourrait se faire.
Je ne veux pas vous causer de tracas, mais ça pourrait se faire."
Je prends un vol pour Melbourne puis je me rends en taxi à une ancienne usine de chocolat située à l'ouest de la ville,
là où se trouvent les bureaux de la production. On m'accompagne jusqu'à la salle où se doit se dérouler l'audition.
Je m'assois mais on me demande aussitôt de changer de place car ces sièges sont réservés pour les acteurs principaux.
Grumf ! Ca me rappelle une blague :
"Toc, toc !"
"Qui est là ?"
"Claudia."
"Claudia qui ?"
C'est ça, le showbiz.
Il est maintenant clair que je devrais repérer les deux acteurs de complément qui ont le plus mauvais esprit
et me planter à côté d'eux pour que nous dessinions des obscénités tout en ricanant. Un problème dérange
le réalisateur: étant donnée la nature très hétéroclite de la distribution et des personnages,
il pourrait y avoir trop d'accents différents dans le film. Alors il voudrait que nous prenions tous
l'accent de notre personnage durant l'audition pour voir quel genre de "salade" ça va donner.
Après un vol en avion, une course en taxi et un peu de travail sur ma voix, ma première journée de tournage
(mais je devrais peut-être dire ma première nuit: c'est un film de vampires, après tout) consiste à ce que je sorte
de mon tombeau en entendant la musique de Lestat. David Lee, l'ingénieur du son, me joue un extrait de la musique.
C'est un morceau d'un groupe connu. Je félicite le réalisateur pour avoir réussi à embaucher un aussi bon groupe pour la bande-son.
Il ne répond pas. Je félicite David pour l'Oscar qu'il a reçu pour "Matrix" et puis je titube sur mes hauts talons jusqu'à l'endroit
où je dois commencer ma scène. Il y a de la fumée et des ventilateurs. Les techniciens jettent des feuilles en l'air et les portes
s'ouvrent sur le passage d'une caméra montée sur grue qui filme au ralenti une fille aux fausses mèches, vêtue d'un sari,
qui avance péniblement sur les pavés. Nous faisons quelques prises.
Le réalisateur me dit qu'il a ce qu'il lui faut mais il ajoute néanmoins : "Faisons quelques prises de plus, ce sera peut-être encore mieux".
Je lui demande si je peux en faire une à ma manière. J'entre quand on me le dit et je commence ma fantastique (mais muette) interprétation.
Au milieu de la scène, le réalisateur dit "Coupez !". Il ne sait pas trop pourquoi, mais ça ne lui plaît pas. Quelques jours plus tard,
il me dit qu'il a vu les rushes. Je lui demande ce qu'il en pense. "L'ironie," me dit-il, "c'est que la scène que j'ai préférée,
c'est celle où tu as fait ce que tu voulais et où moi, j'ai dit "Coupez !" en plein milieu."
Humpf!
L'un des producteurs vient me
voir et m'annonce que le script vient d'être modifié. Mon personnage a maintenant plus de texte et il est devenu évident qu'il y a
quelque chose entre lui et Marius (que joue Vincent Perez). Il me dit qu'il m'a vue dans les rushes (ceux où je sors de ma tombe)
et que ça lui avait tellement plu qu'il avait décidé de donner plus d'importance à mon personnage. Il ajoute qu'il ne se doutait pas,
lors de la lecture en commun du script, que je donnerais autant d'intensité à mon rôle.